Restauration du Monastère (1817)
Acquisition de deux maisons et commencement de constructions (1825)
L’année 1825, notre bonne Mère Marie Stanislas, qui n’avait pas moins de zèle que sa devancière pour l’extension de notre Monastère, fit l’acquisition de deux maisons qui, par leur situation relativement à la nôtre, nous étaient dans une nécessité indispensable ; ce ne fut qu’après des difficultés sans nombre que nous parvînmes à nous en rendre propriétaires, à l’aide de nos moyens ordinaires qui consistaient à accumuler nos dettes. Les vendeurs, très peu soucieux de les alléger, surent tirer parti de la nécessité où ils nous voyaient réduites : il fallut donc conclure avec eux des marchés onéreux.
Le premier qui s’arrêta fut le plus désavantageux, puisque cette acquisition se réduisit pour nous au seul emplacement par le défaut de solidité et la vétusté des murs qui ne purent soutenir les réparations s’écroulèrent sous la main des ouvriers, comme la ville de Jéricho devant l’arche(10). Nous n’eûmes pas même le dédommagement de profiter des matériaux qu’on ne pouvait toucher sans les réduire en poussière. Ainsi le terrain se trouvait assez bien payé pour que personne ne nous en disputât la jouissance : c’était du moins une consolation pour nous. Dans cette pleine liberté d’user de nos droits, nous perdîmes d’autant moins de temps à rebâtir notre édifice que les lacunes qui se trouvaient dans ces murs, à demi écroulés, nous exposaient à la vue des passants. Après avoir achevé la démolition, nous reconstruisîmes un nouveau local ; il comprend dans le bas plusieurs pièces telles que la bibliothèque et le chapitre. Le haut formait un corridor et huit cellules, commencement de notre dortoir.
La maison que nous achetâmes en second lieu valut aussi à notre excellente Mère des contradictions de plus d’un genre ; mais elle était du moins neuve et très bien conditionnée pour des particuliers. Cependant la construction en était si irrégulière et si peu propre à y établir notre chœur, auquel nous ne pouvions donner un autre emplacement, qu’il fallut nous résoudre à tout raser de fond en comble.
La différence qu’il y eût entre la première et la seconde destruction, fut que celle-ci nous laissa d’excellents matériaux qui furent tous employés, en y ajoutant néanmoins considérablement, à l’érection de ce chœur si vivement et depuis si longtemps désiré, mais dont notre bonne Mère n’eut la consolation de conduire l’ouvrage qu’à moitié. C’étaient deux grandes entreprises ébauchées et à l’égard desquelles les personnes du monde nous comparaient à cet homme imprudent cité dans l’Évangile pour n’avoir pas calculé ses ressources avant de commencer à bâtir (11) ; d’autres disaient que nous avions certainement quelques moyens cachés : ils l’étaient en effet, mais c’était dans le secret de la divine Providence, en qui notre confiance nous semblait d’autant moins téméraire, qu’elle était secondée par les instructions que nous a laissées notre St Fondateur au sujet de semblables difficultés.
Loin de nous donc toute défiance de l’assistance de Dieu pour achever son œuvre : le moment de la poursuivre nous était marqué d’ailleurs par des circonstances impérieuses : ces deux maisons, enclavées dans la nôtre, étaient en vente et sur le point de passer en des mains étrangères, ce qui ayant lieu, nous fermait la porte à tout espoir de voir jamais établir la clôture : raison suffisante pour ne pas hésiter un instant. La nécessité de relever le premier bâtiment dont nous avons parlé, vient d’être prouvée. Il n’était pas moins urgent de mettre la même célérité au second ; car de bonne foi on aurait eu pitié de voir que malgré l’industrie que mettait chacune à se ménager une place dans la chambre qui nous servait de chapelle, plusieurs étaient obligées de rester à la porte, dont l’ouverture forcée était souvent incommode en hiver ; tandis qu’en été, un espace si resserré exposait à suffoquer.
10 – Cf Jos 6
11 – Cf Lc 14, 28-30