Fondation du Monastère de Metz, 56ème de l’Ordre, établi d’abord le 24 avril 1633 – retranscription de l’original sis aux Archives Départementales de Moselle
On bâtit le reste du Monastère.
Notre Très Honorée Mère Anne Victoire d’Auburtin eut besoin de son zèle et de son affection pour le bien de notre Communauté, pour se dévouer comme elle le fit à nos intérêts. La dureté des temps qui se faisaient sentir même aux personnes les plus riches, peut faire comprendre la situation d’une Maison, qui, depuis sa fondation, n’avaient subsisté que par les soins d’une spéciale Providence, dont nous ne pouvons assez exalter et reconnaître les bienfaits. Cependant, pour éviter le malheur d’être ensevelies sous les ruines de nos anciennes demeures, il était urgent de bâtir, forte de sa confiance en Dieu, notre chère Mère l’entreprit, et les secours qu’elle reçut dans ses deux triennaux, la mirent en état de faire construire heureusement les deux grands
corps de logis qui étaient devenus indispensables.
La première partie du cloître, avec le corps de logis qui contient la tour, la chambre de la Soeur Portière, les Parloirs, l’économie, et l’appartement de nos demoiselles Pensionnaires, avait comme nous l’avons dit, était bâti en 1730, par les soins de notre Très Honorée Mère Marie Ursule de Custine, dont la mémoire se conserve avec reconnaissance dans cette Maison. Notre Très Honorée Mère Anne Victoire d’Auburtin continua les trois autres parties du cloître, où elle fit placer des vitrages qui nous mettent à l’abri des injures de l’air. Le côté qui répond au premier construit, sert d’avant choeur, séparé à chaque bout par une porte de bois de chêne à deux battants : la grande porte du choeur est de même ; elle a huit pieds de hauteur sur cinq de largeur ; et le dessus et décoré d’une très belle sentence. Le choeur a 33 pieds de longueur sur 26 de largeur ; il est séparé par quatre grands portiques de menuiserie, de sorte que les stalles font le carré. Entre les portiques sont placés 19 bancs avec leurs assises et appuis ; un côté est occupé par les Soeurs Associées, et l’autre par nos demoiselles Pensionnaires ; derrière les stalles du fond se trouve une allée pour éviter à la Soeur sacristine de passer au milieu du choeur. Le choeur a 16 pieds de haut, le plafond est fait en voûte avec compartiment, et dans le milieu se voit un Saint Esprit. Comme la boiserie n’a que quatre pieds de hauteur, le surplus est garni de grands tableaux fort beaux. Dans le fond de l’allée des Soeurs Associées, est la porte d’une petite sacristie pour passer les ornements ; le choeur est distribué de manière que les portiques ne diminuent point le jour des quatre grandes croisées, qui ont dix pieds de haut sur cinq de large ; elles sont directement dans le milieu, et sont faites à petits bois. Dans le même côté de cloître qui joint le choeur, est la grande sacristie, qui a 26 pieds de longueur sur 14 de largeur ; il y a une cheminée, et deux croisées, qui prennent le jour sur le jardin comme celle du choeur. Dans la quatrième partie du cloître est placée une fontaine, peinte en marbre. Le jardin du cloître a plus de quatre toises en carré, autour duquel est un pavé de pierre de taille, d’environ six à sept pieds de largeur ; dans le jardin on a pratiqué un jet d’eau, qui a six pieds de diamètre, entouré d’un gazon d’Espagne, qui fait un coup d’oeil agréable. Du cloître on est conduit dans le vestibule, où est placé le grand escalier qui conduit au dortoir ; l’escalier du premier étage est fait de pierre, avec une rampe de fer très simple vernis en bleu. Le vestibule sert de passage pour l’entrée du jardin, dont la porte est faite en architecture, avec des refends en tours creuses ; le dessus de la corniche est couronné d’un fronton cintré et coupé ; le milieu est orné des armoiries de l’Ordre. On est conduit par ce côté de cloître dans la cuisine, qui prend jour sur le jardin par de grandes croisées : elle est voûtée, et a 26 pieds de longueur sur 20 de largeur. De la cuisine, on entre dans la dépense et dans le lavoir, où il y a une fontaine ; vis-à-vis la cuisine est une porte d’architecture, ornée de pilastres, de corniches de frontons coupés : dans le milieu sont placées les armoiries de Monseigneur de Saint-Simon, notre digne Prélat, comme à la principale porte du bâtiment. À l’angle de l’allée de cloître de retour est placé une fontaine, qui est à portée de la Boulangerie, de cette allée on entre au Réfectoire, qui a 52 pieds de longueur sur 22 de largeur et 16 de hauteur ; il est éclairé par six grandes croisées ; dans l’un des fonds et la taque de la chambre de la Communauté, ce qui fait poêle ; à l’autre fond est une fontaine placée dans une niche peinte en marbre, au-dessus sont les armoiries de l’Ordre ; dans le trumeau du milieu des six croisées, est placée la chaire de la Lectrice. Les bancs et les tables sont comme prescrits le coutumier. Cette pièce est soutenue par trois grandes arcades, et plafonnée avec compartiment. En sortant du réfectoire on entre dans la chambre de Communauté ; elle a 33 pieds de longueur sur 25 de largeur ; elle est éclairée de cinq grandes croisées, la cheminée est peinte en marbre, le tour de la chambre est garni de table à armoires pour serrer les ouvrages. Dans le fond de cette chambre, qui nous sert aussi de Chapitre, on a érigé un oratoire dédié à la Sainte Vierge ; le tableau du retable nous représente cette Auguste Reine donnant sa bénédiction au Monastère, que notre chère Mère a mis sous sa sainte protection, la choisissant pour Supérieure perpétuelle de cette Communauté ; nous renouvelons tous les ans cette élection le jour de sa glorieuse Assomption. Dans le fond du cloître, en sortant de la chambre de Communauté, est un vestibule, où est placé un grand escalier de dégagement, qui conduit aux infirmeries. Du grand escalier du corps de logis en face de celui de nos demoiselles Pensionnaires, on est conduit dans le premier dortoir, qui a 15 toises de longueur sur deux de largeur. Le dortoir est soutenu par quatre grandes arcades en pierre de taille, qui posent sur des pilastres avec leurs bases et chapiteaux : dans cette partie il y a 14 cellules, qui ont chacune 10 pieds de longueur sur huit à neuf de largeur. Dans un des fonds du dortoir, est un grand vitrail, de 12 pieds de largeur sur huit de hauteur, fait en cintre ; à l’autre fond est une grille qui donne vis-à-vis le maître-Autel de notre église, où les Sœurs infirmes peuvent entendre la Messe. À côté de cette grille sont placés deux oratoires, un de l’Annonciation de la Sainte Vierge, et un autre dédié à Sainte-Geneviève. D’un côté est un cabinet voûté pour mettre les archives, et de l’autre est un cabinet, dans lequel il y a une grille qui donne dans l’église : ce cabinet sert de passage pour aller sur une galerie qui conduit à un petit parloir. Dans cette partie, vis-à-vis de l’escalier, est une porte vitrée, qui conduit sur une seconde galerie au-dessus du second retour du cloître, et qui va droit à l’économie. À un des bouts du premier dortoir, près du grand vitrail, sont pratiquées deux entrées ; l’une conduit à la pharmacie, et l’autre au Noviciat par un petit corridor. Le Noviciat à 21 pieds de longueur et 16 de largeur ; il est éclairé par de grandes croisées ; dans le fond est posé un Autel orné de colonnes et de pilastres peints en marbre ; à chaque côté de l’Autel est une boiserie vernie en citron, les moulures en bleu : ensuite de la boiserie sont les portes de deux petits cabinets. En sortant du Noviciat on entre dans le corridor des Infirmeries, qui a 15 toises de longueur et cinq pieds de largeur ; il est éclairé par quatre croisées : au fond de ce corridor est une porte vitrée, qui donne sur un balcon de six toises de longueur, orné d’un appui de fer peint en bleu. Dans l’étendue de ce corridor il y a trois chambres d’infirmeries, avec un cabinet qui sert de décharge à cet office. Ensuite est un escalier qui conduit à un vestibule, éclairé par un grand vitrage ; de ce vestibule on entre dans la roberie ; à côté de cet office est un petit dortoir, qui contient 10 cellules. Au bout de ce dortoir est placé l’oratoire de notre Saint Fondateur ; ensuite le grand dortoir, semblable à celui du premier étage. Au-dessus de ces deux corps de logis règnent deux grands greniers pour faire sécher le linge, entre lesquels sont pratiquées de petites chambres pour la lingerie.
On peut facilement juger des peines et des contradictions inséparables d’une si grande entreprise ; Dieu seul sait le nombre de celles que notre chère Mère Anne Victoire d’Auburtin a éprouvées ; elles lui furent adoucies par sa soumission aux volontés de notre Divin Maître, et par son attachement sincère aux intérêts de notre Communauté. Elle éprouva tout particulièrement dans ces occasions, la solidité des conseils de notre Très Honorée Soeurs la déposée, et la bonté de son coeur. Si nous entrions dans le détail des actes de patience et de mortification, auxquels les incommodités du bâtiment donnèrent lieu, nous aurions une ample matière pour édifier et récréer.