Fondation du Monastère de Metz, 56ème de l’Ordre, établi d’abord le 24 avril 1633 – retranscription de l’original sis aux Archives Départementales de Moselle
Traits récréatifs.
Dans le temps où l’on creusait les fondations de notre bâtiment, il arriva une aventure assez plaisante. Un de nos ouvriers trouva une pièce d’or fort antique, ce qui nous donna lieu de soupçonner qu’elle n’était point seule ; nous nous rappelâmes alors qu’un Révérend Père Minime nous avait dit qu’au moyen d’une certaine baguette, il découvrait ce qui était caché sous la superficie de la terre ; nous le fîmes prier de se rendre chez nous pour en faire l’expérience. Il y vint, marcha lentement sur le lieu où nous soupçonnions qu’il y avait quelque chose, et la baguette s’inclina si fort en cet endroit, que le Révérend Père nous assura qu’il y avait de l’or et de l’argent, cette agréable nouvelle ne fut pas plutôt répandu parmi nous, que les plus zélées de nos Sœurs, se croyant déjà hors de l’indigence, ne pensèrent plus qu’au moyen de déterrer le trésor caché. Il fallait pour cela choisir un temps favorable, nous pensâmes que la nuit était celui qui convenait le mieux pour une semblable recherche. Dès que les ouvriers furent sortis chacune mis la main à l’oeuvre avec permission de notre Très Honorée Mère, se servant des premiers outils qu’on rencontra. Animées par les assurances réitérées que leur donnait ce bon Père de l’heureux succès de leurs travaux, elles persévérèrent jusqu’au jour dans ce pénible exercice, qui n’eut d’autre récompense qu’un charbon, qu’elles trouvèrent quatre pieds plus bas dans les fondements. Elles se consolèrent de ce mauvais résultat par le sujet de récréation que cette aventure procurera à la Communauté. Nous eûmes d’ailleurs, pendant cette construction bien du désagrément et de l’embarras, par les fréquentes entrées des séculiers de toutes les nations et Religions, qu’on ne pouvait éviter, malgré les précautions que nous prîmes de demander des sentinelles à M. le Lieutenant du Roi, qui nous les accorda très gracieusement. Elles nous furent surtout très utiles pour nous préserver des voleurs, et éviter les alarmes que leurs visites auraient pu nous causer ; mais grâces à Dieu, il ne nous arriva rien de fâcheux.
Le seul agrément que nous avons trouvé dans la cours de la construction de ce bâtiment, a été les visites réitérées dont Monseigneur nous honorait, se faisant un plaisir de nous surprendre au Réfectoire, et de visiter notre cuisine. Un jour, pendant la retraite de notre Très Honorée Mère, nous nous trouvâmes un peu embarrassées : un parent de notre très chère Soeur l’Assistante, voulant régaler la Communauté, envoya des pigeons, qui peu accoutumés de voler sur nos tables, furent interdits à la vue du Prélat. Celle à qui on les avait déjà servis, prirent le parti de leur donner asile dans leurs poches, quoique rôti. Notre cher Mère allant le recevoir, le prévint sur ce petit extraordinaire, dont il parut satisfait. Faisant le tour du Réfectoire, et n’en voyant point, il en demanda la raison à une de nos Soeurs, qui lui répondit sincèrement qu’elle avait cru devoir le soustraire à sa vue, ce qui le fit sourire, et lui prouva notre frugalité, dont il a souvent fait l’éloge.